Avatars IA de proches décédés : résurrection numérique en Chine

Published On: juillet 22, 2024//Categories: News, IA//4 min read//806 words//
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Avatars IA de proches décédés : quand la technologie défie la mort

La mort a toujours été l’ultime frontière de l’existence humaine. Mais aujourd’hui, grâce aux progrès fulgurants de l’intelligence artificielle, cette frontière semble de plus en plus poreuse. En Chine, des entreprises proposent désormais de « ressusciter » numériquement nos proches disparus sous forme d’avatars IA. Une innovation fascinante qui soulève de nombreuses questions éthiques et existentielles.

La résurrection numérique, nouvelle tendance en Chine

C’est une scène digne d’un épisode de Black Mirror. Sun Kai, un cadre chinois de 47 ans, discute régulièrement avec sa mère décédée en 2018… ou plutôt avec son avatar généré par intelligence artificielle. « Je ne le considère pas comme une personne numérique. Je le vois vraiment comme ma mère », confie-t-il. Cette technologie a été développée par Silicon Intelligence, une startup basée à Nankin spécialisée dans la création de clones numériques de personnes décédées.

Le principe ? Utiliser les données personnelles du défunt (photos, vidéos, messages vocaux) pour créer un avatar capable de reproduire sa voix, ses expressions et même certains traits de personnalité. Le résultat est troublant de réalisme, au point que certains utilisateurs disent avoir l’impression de véritablement converser avec leur proche disparu.

Un marché en pleine expansion

Silicon Intelligence n’est pas un cas isolé. De nombreuses entreprises chinoises se sont engouffrées dans ce marché prometteur de l' »immortalité numérique ». Super Brain, une autre startup de Nankin, propose des services similaires. Même le géant des pompes funèbres Fu Shou Yuan s’est lancé dans l’aventure en créant un « cimetière numérique » où les visiteurs peuvent interagir avec des avatars IA des défunts via des QR codes placés sur les pierres tombales.

 

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Les tarifs varient considérablement, de quelques dizaines de yuans pour un avatar basique à plusieurs milliers pour des versions plus sophistiquées. Mais le véritable défi reste la collecte de données personnelles suffisantes pour créer un clone numérique convaincant.

Des enjeux éthiques majeurs

Si cette technologie fascine, elle soulève également de nombreuses questions éthiques. Le consentement du défunt est-il nécessaire ? Quel impact sur le processus de deuil des proches ? N’y a-t-il pas un risque de manipulation émotionnelle ?

Ces interrogations ne sont pas propres à la Chine. Aux États-Unis, le chatbot Project December a fait polémique en permettant à un homme de « dialoguer » avec son ex-fiancée décédée. Microsoft a même déposé un brevet pour un système similaire, avant de faire marche arrière face aux critiques.

Pour approfondir ces enjeux éthiques cruciaux, je vous recommande la lecture de cet article scientifique qui analyse en détail les implications des « griefbots » et autres avatars posthumes basés sur l’IA générative.

Une révolution culturelle ?

En Chine, cette technologie pourrait bien bouleverser le rapport à la mort et aux rites funéraires. Dans un pays où les discussions sur la mort restent largement taboues, ces avatars IA offrent une nouvelle façon de maintenir un lien avec les disparus.

« Nous espérons que les familles verront le cimetière numérique comme un lieu pour célébrer la vie plutôt qu’un site qui inspire la peur de la mort », explique Fan Jun, un dirigeant de Fu Shou Yuan.

Les limites actuelles de la technologie

Malgré des résultats parfois bluffants, la technologie se heurte encore à d’importantes limitations. La principale ? Le manque de données personnelles exploitables, surtout pour les personnes décédées avant l’ère des réseaux sociaux.

« Pour qu’un clone numérique soit vraiment réaliste, il faudrait au moins 10 ans de préparation en amont, en tenant un journal quotidien par exemple », estime Zhang Zewei, fondateur de Super Brain.

Vers une immortalité numérique ?

Si ces avatars IA restent encore loin de pouvoir véritablement « ressusciter » nos proches, ils préfigurent peut-être une nouvelle forme d’immortalité numérique. Certains, comme Yang Lei qui a cloné son oncle décédé, envisagent déjà de préparer leur propre avatar posthume.

« Un avatar IA n’est pas la même chose que l’humain qu’il remplace. Mais quand nous perdons notre corps de chair et de sang, au moins l’IA préservera nos pensées », philosophe-t-il.

Entre espoir technologique et questionnements éthiques, les avatars IA de personnes décédées incarnent les paradoxes de notre époque. Une chose est sûre : ils nous obligent à repenser en profondeur notre rapport à la mort, à la mémoire et à l’identité à l’ère du numérique.